Inspirations nordiques

Petit bout de terre d’Europe continentale, presque péninsulaire par son lac Peïpous et le fleuve Narva qui le détache à l’Est de son ancien envahisseur, comme si la terre même aspirait à s’en dissocier. Cette volonté d’identification aux pays nordiques se ressent par cette recherche du design et son virage numérique qui a fait bien du chemin depuis la création de Skype.

Toutefois, les échos du passé se font ressentir, non seulement par la présence de la magnifique cité médiévale et ses attraits touristiques nous y plongeant, nous racontant cette époque, mais aussi par la forte présence de ses habitants russophones. Il est amusant de constater le contraste entre les cafés et restaurants branchés estoniens qui proposent de savoureux plats  d’inspiration nouvelle cuisine, à des prix appétissants, à certains autres, qui semblent s’être figés avec le rideau de fer, où le sourire y est optionnel et le service est à l’image des murs décrépis.

Hors de l’enceinte fortifiée, l’histoire se dresse également par des maisons à appartement dans l’ancien quartier ouvrier Kalamaja (maison du poisson en estonien) où s’agglomérait pêcheurs, poissonniers et charpentiers de bateaux avant que le chemin de fer s’y installe à proximité et impose l’arrivée d’une nouvelle faune entraînant la construction, au début du siècle dernier, de ses demeures en bois, fonctionnelles, mais qui, aujourd’hui, suscitent un regain d’intérêt. Charmé par l’ambiance générée par la variation de couleurs utilisées, égayant la sobriété de ce phantasme de pyromane, je croisai un trio dubitatif de mes intentions. Sentiment partagé. Si ce n’était pas de leur démarche funambulesque, je n’aurai probablement pas eu autant d’assurance à les laisser m’approcher, sachant que leurs réflexes et adresses à cet instant étaient des plus réduites. L’anglais approximatif dont ils firent usage suffit pour que l’on sympathise et à leur demande j’éternisai notre rencontre par un cliché que je me suis engagé à leur envoyer. Chose promise, chose due.

Légèrement excentrée du quartier médiéval, Telliskivi a revitalisé d’anciens complexes industriels pour en faire le centre créatif de Tallinn où compagnies, cafés, studios se jouxtent et hipsters se côtoient. Il est amusant de constater cette constance mondiale où ces lieux, jadis, de labeurs et d’exploitations deviennent ceux d’oisiveté, quoique l’exploitation persiste lorsqu’on constate les prix des produits qui y sont vendus… Heureusement, le tout est franchement sympathique, de plus j’étais en bonne compagnie me permettant de me familiariser sur ce pays oublié, et pourtant charmant, d’Europe.

Rotermann quant à elle, davantage BCBG, privilégie la contemporanéité de son architecture, bien que parfois elle s’agrège aux constructions passées. Plus aseptisée, moins vibrante et organique, elle séduit par ses atouts rectilignes, ses allées piétonnières, et ses lieux de rencontres, faisant d’elle un endroit agréable où déambuler avant de se poser pour manger un morceau.

Voir l'album

La promenade au travers du reposant parc Kadriorg dans lequel je contemplai son charmant château, me mena au musée Kumu, où je me suis initié à l’art estonien.  L’accueil sous le regard inquiétant des poupons statufiés laisse présager une expérience particulière. Sans entrer dans l’analyse, n’étant point un expert en la matière, il en reste que cette exposition m’a marquée par la singularité des œuvres. La façon dont la vie quotidienne est dépeinte ne manque pas de variété dans l’utilisation des formes et des couleurs. Comme si c’était avant tout de cette manière que s’exprimaient les créateurs de cette période, certains cédant, néanmoins, parfois à une approche plus fantasmagorique présente d’ailleurs au début du XXe siècle. Je mentionnerai d’ailleurs le cinéaste d’animation Rein Raamat, dont l’œuvre originale est reflétée par ce court film que je qualifierais de psychédélo-prog-communiste. Saurez-vous en trouver le sens?

Voir quelques oeuvres du Kumu

Tallinn regorge d’intérêts culinaires, artistiques, architecturaux et évidemment, humains. Résolument tourné vers l’avenir, y être passé m’aura donné l’intention d’y retourner dans le futur. D’ici ces retrouvailles, si j'en ai la chance un jour, j'embarquai pour traverser le golfe de la Finlande afin d'y découvrir le pays du même nom.

Articles les plus consultés